Une photo d’archive inédite pour ouvrir un volet méconnu de l’histoire des Instituteurs du Finistère

Celui des prisonniers de guerre des oflags et stalags du IIIè reich

 

Deux adhérents de notre Association ont récemment mis à jour, dans leurs archives privées, une photo datant de 1947 dédiée aux élèves d’une classe soit de CE2  soit de CM1 et à leur maître Jean Yves Corcuff   à l’Ecole publique de  garçons de Guilvinec (F-29730). Ils ont souhaité, tout en gardant l’anonymat, mettre ce document à notre disposition  afin qu’il soit représenté sur ce site. Nous les en remercions  très chaleureusement .

 Les  visiteurs  pourront le consulter en cliquant ici. Ils ne manqueront pas de remarquer tant  l’agencement  sommaire des lieux, la hauteur du plafond, la rusticité du mobilier scolaire,  les pupitres  munis des encriers de rigueur et la sobriété de la décoration que la tenue  des écoliers en  blouse noire . Tout en souriant  au photographe, leur attitude témoigne de leur bonheur d’être réunis dans une  classe où transparaît  leur déférence pour un  maître en blouse grise dont la présence et l’autorité  bienveillante    interdit toute velléité de dissipation…

On pourra aussi se rendre compte, avec la  complicité de nos deux adhérents, que Jean Yves  Corcuff, ancien élève-maître à l’Ecole normale de Quimper (Promotion ENG, 1928-1931 ) fut   nommé instituteur stagiaire en  1931  et  mobilisé en 1939 à l’âge de 28 ans. Son régiment fut engagé dans  la drôle de guerre , il fut fait prisonnier en 1940 alors que son frère jumeau -appartenant à la même unité-  fut  tué  au combat . Sa captivité  au stalag IX-B de Bad Orb  en Hesse ,dans le centre-ouest de l’Allemagne, dura cinq ans. Dans ce camp tristement célèbre pour notamment le régime particulier imposé aux prisonniers soviétiques  et la ségrégation raciale exercée à l’égard des soldats juifs américains, il fut soumis à  des travaux forcés  agricoles dans une ferme , propriété  d’un tenant du  nazisme. Il y  souffrit durement de la faim . Mais  au-delà de ces privations et de sa souffrance personnelle, il en revint vivant  et retrouva son poste d’instituteur au Guilvinec en 1945…

 On soulignera   que cette dure  expérience de la guerre dont nous avons ici un exemple saisissant  ne semble pas avoir donné lieu, au moins chez les instituteurs prisonniers à beaucoup d’études ni sur la vie quotidienne dans les stalags ou autres oflags ni sur  les effets dévastateurs  exercés par  la captivité. Celle-ci, en elle-même, constituait déjà un traumatisme majeur et la question se  pose de savoir comment l’on pouvait s’en relever .

On pourra toutefois consulter, en se rendant à l’URL  :

https://books.openedition.org/pur/5477?lang=fr

l’article de  Christian Bougeard et Nathalie Cariou   intitulé : 

“Les prisonniers  de guerre  de 1940-1945 en Bretagne : approches générales et exemple finistérien”

Il est inséré aux pages 117-130 de l’ouvrage collectif, La captivité des prisonniers de guerre (1939-1945). Histoire,art et mémoire,pour une approche européenne, dirigé par  Jean-Claude Catherine publié en 2008 aux PUR . On en retiendra, pour une première approche : “qu’au cours de la Seconde Guerre mondiale, dix millions de soldats alliés ont été faits prisonniers par le Reich nazi tandis qu’onze millions de soldats allemands étaient capturés par les Alliés. Malgré l’ampleur de ce phénomène et les nombreux sévices subis par ces prisonniers de guerre (faim, humiliations, déshumanisation, exil…), leur histoire a été longtemps éclipsée par celle des camps de concentration et d’extermination. Cet ouvrage s’inscrit dans une lignée d’efforts faits pour connaître et faire connaître la captivité des prisonniers de guerre, avec ce double objectif d’en perpétuer la mémoire et d’éclairer des aspects particuliers peu étudiés. À travers une démarche comparatiste en Allemagne, en Autriche, en Pologne et en France, il s’efforce de comprendre la dimension européenne des souffrances causées par la captivité de guerre du fait de la Seconde Guerre mondiale. Dans un contexte de  » devoir de mémoire « , il vise aussi à s’interroger sur la transmission de cette mémoire de la captivité par les témoignages oraux, les œuvres d’art et les initiatives muséographiques. Les études mettent en avant l’intérêt majeur des œuvres créées en captivité par des artistes amateurs ou confirmés. Ces œuvres perpétuent  la mémoire en respectant la vérité  ; elles sont une source essentielle pour la recherche historique, en tant que témoignage de la vie des prisonniers de guerre et comme vecteur de la mémoire de leur génération  » (cf ; l’URL : https://www.decitre.fr/livres/la-captivite-des-prisonniers-de-guerre-1939-1945-9782753506077.html#resume)

 Que  nos deux  adhérents anonymes soient sincèrement remerciés d’avoir suscité cette réflexion. Ell appelle d’autres contributions sur le même thème .