Variétés littéraires : L’INSTITUTEUR D’AUTREFOIS

Au moment où le Parlement se préoccupe de relever la situation matérielle de l’instituteur, le hasard nous a fait découvrir une poésie qui nous représente le portrait du vieil instituteur tel qu’il existait dans la première moitié de ce siècle, sous la monarchie. Les vers sont de M. de Chabot. Il y a là un accent vrai qui plaît tour à tour et qui émeut.    

Ce n’est pas un savant que mon pauvre bonhomme !
Mais il en sait assez ; il sait comment se nomme
Monsieur le Sous-préfet…. et monsieur l’Inspecteur,
De sonner l’Angélus il a toujours mémoire,
Et, le dimanche, assis dans sa chape de moire,
Il dort, les yeux ouverts, aux sermons du pasteur.

Il a le nez pointu, l’œil triste et pas de ventre ;
Ne se grise jamais, jamais…. quoiqu’il soit chantre,
Il est instituteur, greffier et sacristain :
Il met, à certains jours, assez bien l’orthographe
Et des autorités, déchiffre le paraphe….
Ce qui me fait penser qu’il sait le chaldéen.

Il cache maints talents sous un modeste voile :
Autrefois, dans sa classe, il faisait de la toile :
Il pèse habilement le tabac des fumeurs ;
Il sait un peu de tout…. et de mille autres choses…
Enseigne le plain-chant, écussonne les roses,
Et dans son jardinet fait pousser des primeurs ;

N’allez pas lui parler, pour Dieu, d’arithmétique,
D’histoire ou de grammaire et surtout de logique,
Il est bien trop sensé pour savoir tout cela!
Que voulez-vous de plus, pourvu qu’il les enseigne!
Plus d’un ne fait pas mieux qui pourtant le dédaigne ;
Je sais de grands savants de cette force-là.

D’après  le CITOYEN, 7, cinquième année, 15 février 1913

Les Curés et la Liberté de l’Ecole

M. Eon, avocat général, à la Cour de Cassation et Conseiller général d’Ille-et-Vilaine, vient de publier la lettre suivante dans le Républicain de St-Malo.
Ils vont bien les curés. Qui donc écrivait un jour, qu’on ne devait la liberté qu’à la liberté !

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Archidiocèse de Rennes St-Ouen-de-Rouërie
Paroisse de St-Ouen-la-Rouërie*

ce samedi

Père et mère Legrand,

Ma surprise a été grande de savoir que vous avez enlevé votre petite fille de l’école Sainte-Marie et cela sans motif, sans raison. Vous êtes indépendants et non fonctionnaires comme d’ autres, aussi je veux mettre sous vos yeux les conséquences de votre démarche malheureuse : 1° D’abord pour ce fait, vous vous excluez de la réception des sacrements de l’Eglise l’un et l’autre ; 2° Vous exposez votre enfant à ne pas recevoir la science religieuse et compétente pour sa vie chrétienne ; 3° Vous avez le devoir de rendre les livres que vous avait prêtés l’Ecole Ste-Marie dont je suis responsable ; 4° Du même coup vous vous fermez la bourse de tous les honnêtes gens dont vous avez usés (sic) jusqu’ à ce moment : 5° Enfin vous devez savoir que le dimanche votre enfant n’a pas le droit à la tribune de l’église réservée aux enfants de l’Ecole libre, et par faveur, aux enfants de fonctionnaires. C’est vous dire que la surveillance vous incombe totalement.

De tous ces points, il faut conclure que vous eussiez bien fait de prendre conseil de vos meilleurs amis, sans écouter ceux qui vous promettent monts et merveilles le plus souvent sans y tenir.

Rien n’est encore perdu si vous voulez écouter la voix de votre conscience et revenir sur votre décision hâtive et malheureuse ; et vous sauverez ainsi votre honneur et votre consolation pour le temps et l’éternité.

Je vous salue, Votre pasteur,

Signé : R. BREVAULT
Curé de St-Ouen-la-Rouërie.
D’après le Citoyen n°7 (5è année, 15 février 1913)
*Saint-Ouen-la-Rouërie (35460), petite commune au nord-est de l’Ille-et-Vilaine.

Plouhinec : un exploit.

Le déjà célèbre recteur, dont Plouhinec ne s’honore pas, vient encore de se signaler par un nouvel exploit. Oyez plutôt.

Mercredi 22 janvier, à l’occasion d’un mariage et ainsi que le veut un vieil usage, des jeunes gens, après le repas de noces, avaient organisé un bal en plein air. Il était 9 heures du soir, au clair de la lune et au son d’un accordéon, des couples mazurkaient, polkaient ou gavottaient avec ardeur, sous les regards attentifs des vieux parents. Soudain, l’homme noir fit son apparition parmi les danseurs ; il grinçait des dents et ses yeux lançaient des éclairs, son bras était armé d’une énorme canne qui, à maintes reprises, s’éleva et retomba sur quelque chose, sur des échines sans doute, exécuta de terribles moulinets, enfin fit de si bonne besogne que cinq minutes plus tard il ne restait plus sur la place que le vaillant grenadier du pape, tout fier de son haut fait. Et l’on dit que la musique et la religion adoucissent les mœurs!
Certaines mauvaises langues n’hésitent  pas à dire que M. le recteur s’est rendu coupable d’une agression nocturne.

Potr ar bigornou.

D’après le Citoyen n°6 (cinquième année), 8 février 1913. 

Réguiny, commune du département du Morbihan (56190): fin de guerre scolaire en 2017 ! 

Ainsi que rapporté dans un article récent du Télégramme, un lecteur morbihannais  nous signale l’ouverture  d’une nouvelle école publique , à Réguiny, à la rentrée scolaire  de septembre 2017. Cette commune était dépourvue d’école publique depuis 60 ans.

Cet évènement refondateur intervient après des affrontements  sans merci entre le clergé local tout puissant associé à la bourgeoisie  et le camp des défenseurs de l’école publique laïque et républicaine dont les instituteurs et institutrices  publics successivement nommés à Réguiny.

Parmi eux se trouve une ancienne élève-maîtresse de l’ENF de Vannes  (Germaine Le Bihan) qui y exerça son métier de 1912 à 1923 . Elle résista pendant plus de 10 ans aux exactions du curé de la paroisse… avant de demander et d’obtenir sa mutation  au Sénégal (ex-AOF !).

Ses qualités de  pédagogue « missionnaire, laïque et républicaine » y  furent vite reconnues et les autorités coloniales lui confièrent la mission de créer et de diriger la première Ecole Normale d’Institutrices d’Afrique noire. Son oeuvre scolaire et civilisatrice fut largement saluée  au point  de devenir, auprès de ses anciennes normaliennes,  l’Africaine blanche.

Ainsi, si Germaine Le Bihan, devenue Germaine Le Goff, perdit le combat de Réguiny elle  triompha à Rufisque (Sénégal) où se trouvait  « son » Ecole Normale d’Institutrices.
Les lecteurs intéressés par la renaissance de l’Ecole Publique à Réguiny,dans le Morbihan , trouveront l’article du Télégramme en cliquant ici.

Travail de mémoire  en pays catalan : « Maîtres Soldats » 

Les visiteurs du site prendront connaissance des recherches effectuées  pour identifier les noms des instituteurs  inscrits sur le monument aux morts pour la France (14-18) de Argelès- sur-Mer (Pyrénées-Orientales).Ils pourront consulter l’article de Véronique Parayre  paru  dans L’Indépendant du 4 juin 2017 et accéder au lien  dédié  suivant orienté vers Le journal Catalan du 2 juin 2017.