Déjà Blaise Pascal (1623-1662) dans un texte resté célèbre proclamait que :“Le moi est haïssable. Ainsi ceux qui ne l’ôtent pas, et qui se contentent seulement de le couvrir, sont toujours haïssables. En un mot le moi a deux qualités ; il est injuste en soi, en ce qu’il se fait le centre de tout ; il est incommode aux autres, en ce qu’il le veut asservir ; car chaque moi est l’ennemi, et voudrait être le tyran de tous les autres «
Mais à côté du MOI ( pronom personnel tonique de la première personne du singulier et des deux genres représentant la personne qui parle ou qui écrit) se rangent tous les autres pronoms de notre langue de cette même catégorie. Ils furent les amis de nos scolarités élémentaires… mais d’où viennent-ils ? à quoi servent ils ? comment les utiliser à bon escient pour dire bien ce que l’on a à dire ou à écrire? Au fond qui en assume la singularité ,le caractère irréfragable et la pérennité?
On songe à l’Académie française ?Qu’en est-il ? « Créée en 1635 sous Louis XIII, l’Académie française, composée de 40 membres nommés à vie, a pour «principales fonctions», selon l’article 24 de ses statuts, «de travailler, avec tout le soin et toute la diligence possibles, à donner des règles certaines à notre langue et à la rendre pure, éloquente et capable de traiter les arts et les sciences». Pour ce faire, elle devait réaliser, à l’origine, quatre ouvrages : une rhétorique, une poétique, une grammaire et un dictionnaire. Mais en dehors d’une grammaire – fortement décriée – publiée en 1932, elle ne conservera finalement qu’une seule de ses missions : le dictionnaire. Il s’agit d’un ouvrage qui «ne devra ne pas seulement enregistrer dans un ordre alphabétique des mots avec leur explication, [mais] devra choisir aussi les mots d’usage propres à figurer dans la conversation, dans les discours, dans les écrits qui doivent être à la portée de tous», explique l’académie sur son site.
Le dictionnaire en tant que tel, ou ses prises de position, ont-ils cependant une valeur juridique? «Aucune institution n’a autorité sur la langue française», affirme Maria Candea, professeur de linguistique à la Sorbonne-Nouvelle.«Réglementer la langue française ne veut rien dire. L’Académie française peut faire des recommandations au public, mais il n’y a pas de ‘‘gardien de la langue’’, pas d’organisme qui fixe la norme, abonde un haut fonctionnaire travaillant dans ce domaine. Le principe reste celui de la liberté d’expression et les Français peuvent, à titre privé, écrire comme ils l’entendent. Pour se moquer de l’académie, Voltaire en son temps s’amusait d’ailleurs à faire des fautes d’orthographe.» Voir l’URL :https://www.liberation.fr/checknews/pronom-iel-lacademie-francaise-a-t-elle-autorite-sur-la-langue-francaise-20211119_GCUE4D5AWVBWTIHWJRE3ZRT2BA/
La linguistique et les utilisateurs du langage peuvent aussi être confrontés entre autres à l’emploi pertinent du ON , sans doute moins haïssable que le MOI mais se cantonnant dans l’indéfini et le neutre de la troisième personne pour exprimer l’idée « d’animé humain et fonctionnant toujours comme sujet , def,cnrtl » . On notera ici que ce ON fut longtemps décrié chez tous les écoliers de France au point où leur était opposée cette phrase : « On, pronom cochon, qualifie celui qui l’emploie ! ». Bref que ce soit le MOI , le ON ou tous les autres pronoms personnels, ils constituent une panoplie d’éléments remarquables de notre langue nationale.
Dans cette joyeuse confrérie des suppléants des noms communs de notre langue est apparu récemment un nouveau représentant (déjà adoubé par le Petit Robert) et répondant à l’appellation non contrôlée par l’Académie française de « IEL » qui reste , il faut bien le dire , énigmatique pour les oreilles non averties .
Jean-Marie Rouart, membre de l’Académie , l’a récemment affublé de pronom factice c’est à dire qui procède de l’artifice par opposition à ce qui est fabriqué par l’homme à l’imitation des choses naturelles. On pourra découvrir le point de vue sans appel de l’académicien en consultant sa tribune dans Le Figaro du 19 novembre 2021:«Le pronom factice “iel” dans le Robert, ou le virus de la déconstruction de notre langue».
Selon ce quotidien, le pronom personnel «iel», contraction de «il» et «elle», terme militant qui entend désigner les personnes transsexuelles ou ne s’identifiant ni au «genre» masculin ni au «genre» féminin, vient d’être reconnu par la version en ligne du Robert. L’écrivain s’insurge contre la décision des responsables de ce dictionnaire : « La langue française, puisque c’est elle qu’on remet incessamment en cause, doit-elle se plier docilement à toutes les aspirations individuelles ou catégorielles? La volonté d’introduire le pronom factice «iel» comme fait le dictionnaire Robert, n’est que la queue de comète de la pression exercée par les tenants de l’écriture inclusive. On aurait tort de prendre à la légère ces entorses folkloriques faites à notre langue, elles sont les symptômes d’un mal profond. On le sait depuis toujours, les langues contiennent des valeurs essentielles: elles ne sont pas seulement un moyen de communication » ( cf. l’URL :https://www.lefigaro.fr/vox/societe/jean-marie-rouart-le-pronom-factice-iel-dans-le-robert-ou-le-virus-de-la-deconstruction-de-notre-langue-20211119°)
Les visiteurs surpris, parfois après avoir participé à l’éradication de leur langue regionale, de voir apparaître et paraître la nouveauté adoptée sans ambage par leur langue nationale pourront consulter pour se rassurer à ce sujet,en cliquant ici, un bref article à incorporer à la série dédiée à «l’ écriture inclusive » . Article plein d’humour , écrit par la philosophe Catherine Kintzler, il a été publié dans son Blog Mezetulle le 20 novembre 2021 :
Il est intitulé :
« Iel », qui est-ce : une personne ou un person ? »
Ceci ne manque pas de prêter à sourire d’autant que C.Kintzler ignore-et c’est bien naturel -que le « person » évoqué ci-dessus en masque un autre sans doute hors de cause dans ce débat, le « person » de la langue bretonne signifiant recteur ou curé !…On voit bien ici qu’une personne et a forceriori un (eur, en breton) person peut en cacher un(e) autre !
Au demeurant cet épisode vient accréditer l’idée qu’il est relativement aisé de faire vendre vessies pour lanternes et d’en profiter pour occulter les problèmes sociaux et sociétaux du moment.
Que Catherine Kintzler soit remerciée de nous avoir autorisé à reprendre son article pour l‘insérer du ce site.